Source : Bitter Winter

Le Saint-Siège a rappelé à la France que lorsque des tribunaux civils remettent en cause la décision d’expulser une moniale de son ordre religieux, la liberté de religion est « gravement violée ».

par Massimo Introvigne

Le château de Pontcallec, qui abrite le siège des Sœurs Dominicaines du Saint-Esprit. Crédits.

Le château de Pontcallec, qui abrite le siège des Sœurs Dominicaines du Saint-Esprit. Crédits.

Si certains pensent que l’attaque contre la liberté religieuse en France ne vise que les  « sectes » et l’islam, ils se trompent. Le 13 avril dernier, une organisation religieuse a déploré dans un communiqué officiel être victime en France d’une « grave violation des droits fondamentaux à la liberté religieuse et à la liberté d’association ». Le nom de cette organisation religieuse est l’Église catholique romaine, et la déclaration émane de la Salle de presse du Saint-Siège.

En résumé, un ordre religieux appelé les Sœurs Dominicaines du Saint-Esprit a demandé au Vatican d’enquêter sur le comportement d’une de ses religieuses, Sabine de la Valette, qui avait pris le nom religieux de Sœur Marie Ferréol. Comme il est d’usage dans ces cas, le Vatican a ordonné une visite apostolique du couvent, sous l’autorité du cardinal Marc Ouellet. Suite au rapport de la visite, le Vatican a décidé en 2020 que Sœur Marie devait être renvoyée des Sœurs Dominicaines du Saint-Esprit.

Mécontente de cette décision, Sœur Marie a intenté un procès et a demandé au tribunal de Lorient de déclarer qu’elle avait été renvoyée à tort de son ordre. Le 3 avril, le tribunal a donné raison à l’ancienne religieuse et a ordonné à l’ordre religieux, au cardinal Ouellet et aux deux envoyés du Vatican qui ont effectué la visite apostolique de lui verser plus de 200 000 euros à titre de dommages et intérêts. Selon les médias, le tribunal a estimé que la visite était biaisée car le cardinal Ouellet était « ami » avec une autre religieuse connue pour être une opposante de Sœur Marie.

Des sœurs dominicaines du Saint-Esprit. D’après X.

Des sœurs dominicaines du Saint-Esprit. D’après X.

Le 13 avril, le Vatican a déclaré qu’il n’avait appris l’affaire que par les médias, que le cardinal Ouellet « n’a jamais reçu aucun acte de citation du Tribunal de Lorient » et que ni le cardinal ni le Saint-Siège n’avaient reçu de copie du verdict.

En supposant que ce que les médias ont rapporté sur la décision soit vrai, le Vatican a déclaré que ce qu’il appelle encore un « éventuel » jugement (puisqu’il n’en a pas vu une copie officielle) « pourrait soulever non seulement des questions importantes concernant l’immunité, mais dans le cas où elle porterait sur la discipline interne et sur l’appartenance à un institut religieux, elle pourrait avoir donné lieu à une grave violation des droits fondamentaux à la liberté religieuse et à la liberté d’association des fidèles catholiques ».

Le Vatican a bien sûr raison. La décision a fait l’objet d’un appel et pourrait bien être examinée à Strasbourg par la Cour européenne des droits de l’homme. Cette dernière, à l’instar des tribunaux des États-Unis et du Canada, a constamment statué que les décisions d’expulsion de membres d’un organisme religieux sont fondées sur des raisons théologiques et pas seulement juridiques, sur lesquelles les tribunaux laïques ne peuvent interférer sans violer gravement la liberté religieuse – tout comme l’a dit le Vatican. Mais il semble que la violation de la liberté religieuse soit désormais quotidienne en France.

 

 

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